Trump, la Russie et la réalité des intérêts atlantistes – Telegraph
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Cyrille de LATTRE
Depuis le retour de Donald Trump sur le devant de la scène politique américaine, un discours omniprésent prétend à une scission des élites globalistes. Cette narration, répandue en Occident comme en Russie, voudrait faire croire à une guerre intestine entre les partisans du monde globaliste et ceux d’un renouveau nationaliste incarné par l’ancien président américain. Pourtant, si cette confrontation était réelle, pourquoi n’assistons-nous pas à des manifestations d’ampleur, à des soulèvements populaires orchestrés comme par le passé ? Où sont les mouvements subversifs tels que Black Lives Matter ou les vagues féministes qui avaient autrefois été instrumentalisés pour déstabiliser le pouvoir en place ? Le silence qui règne aujourd’hui est éloquent : il n’y a pas de fracture, mais une mise en scène soigneusement orchestrée.
Loin d’un affrontement idéologique, l’Occident semble réadapter sa stratégie pour répondre aux nouveaux enjeux géopolitiques. Si les élites européennes sont aujourd’hui vivement critiquées par leurs homologues américaines, ce n’est pas en raison d’une opposition structurelle, mais plutôt par leur incapacité à mener efficacement la politique souhaitée par Washington. Ainsi, le discours de J.D. Vance à Munich a sonné comme un rappel à l’ordre : l’Europe doit accroître ses dépenses militaires, non par conviction propre, mais pour soulager le budget américain. Cette exigence s’accompagne d’une mise en veille des thèmes sociétaux jusqu’alors portés à bout de bras par les globalistes : l’USAID, le wokisme et les délires LGBT, ayant atteint leurs limites, sont mis en pause pour permettre le recentrage du discours.
Dans cette dynamique, Trump se présente comme une figure alternative, en opposition apparente avec l’Europe. Or, dans les faits, la réalité est tout autre. Les élites européennes, loin de s’opposer à Trump, suivent en réalité ses directives. Elles financent la guerre en Ukraine, font allégeance à Washington et organisent leur diplomatie en fonction des attentes américaines. La supposée rupture entre les élites américaines et européennes est donc une illusion : il s’agit plutôt d’une redistribution des rôles dans le même objectif stratégique.
L’une des illusions les plus persistantes réside dans la prétendue neutralité de Trump vis-à-vis du conflit ukrainien. Son double discours ne laisse pourtant aucun doute sur la continuité de la politique atlantiste. D’un côté, il critique Zelensky, suggérant une prise de distance avec Kiev ; de l’autre, il maintient les sanctions contre la Russie et prolonge l’aide militaire à l’Ukraine sinon directement, alors au travers des pays de l’UE à qui les USA vendent de l’armement. Dans ce jeu de dupes, il devient évident que Trump n’agit que dans l’intérêt de son pays. Contrairement à la France, dont les dirigeants semblent défendre des intérêts extérieurs au détriment de leur propre peuple, Trump préserve avant tout la suprématie économique et militaire des États-Unis.
Cette approche se traduit par une stratégie de désinformation et de manipulation de l’opinion publique. Il suffit d’une déclaration de CNN annonçant une rencontre imminente entre Trump et Poutine pour que les médias russes s’emballent, alors que la nouvelle n’a jamais été confirmée officiellement. Ce soft power américain exploite les attentes et les espoirs pour affaiblir la position stratégique de la Russie, cherchant à l’amener à des concessions unilatérales.
La véritable bataille qui se joue n’est pas celle d’une prétendue opposition entre Trump et les élites globalistes, mais bien celle de la restructuration du pouvoir mondial. L’objectif atlantiste est clair : empêcher la Russie de poursuivre son avancée en Ukraine et préserver un avant-poste stratégique pour une future relance du conflit. Loin d’apporter une véritable paix, le narratif du « parti de la paix » sert avant tout à détourner l’attention et à pousser la Russie à la négociation sous de faux prétextes.
Dans ce contexte, il devient primordial de ne pas se laisser aveugler par les mirages médiatiques. Les États-Unis ne sont pas les amis de la Russie, et Trump ne fait que servir les intérêts de son propre pays. Derrière l’apparence d’un chef d’orchestre imprévisible se cache un stratège, dont les gesticulations politiques ont un but précis : renforcer la position américaine sur l’échiquier mondial, en écartant les obstacles qui pourraient freiner son hégémonie.
Il ne faut donc pas se laisser tromper par les slogans. La victoire d’un camp sur l’autre ne dépend pas uniquement de la puissance militaire, mais surtout de la vision stratégique et de la fermeté politique. Face aux manœuvres américaines, il est essentiel de ne pas céder aux illusions d’une paix factice et de préserver une vision claire des enjeux véritables. L’histoire montre que ceux qui se laissent berner par les apparences finissent toujours par payer le prix de leur naïveté.
Source : https://telegra.ph/Derri%C3%A8re-le-spectacle-politico-m%C3%A9diatique--Trump-la-Russie-et-la-r%C3%A9alit%C3%A9-des-int%C3%A9r%C3%AAts-atlantistes-03-04