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En réaction à la façon brutale dont le président ukrainien a été reçu par le pouvoir américain, à Washington, on compare de nouveau Volodymyr Zelensky à Winston Churchill. De même qu'il est de bon ton de citer Hitler, Munich ou Staline dès que l'on parle de l'Ukraine. Alors, Volodymyr Zelensky est-il le nouveau Winston Churchill ?
A l'origine, Zelensky n'est pas un politicien, mais un comédien de cinéma et un comique de télévision, qui a connu le succès en Russie. Il ne parlait d'ailleurs que le russe et a dû apprendre l'ukrainien par la suite. Puis il s'est lancé en politique et a été élu président il y a 6 ans. Tout le monde l'a oublié mais sa victoire avait été accueillie froidement en Occident. Les commentateurs de l'époque, ignorant la suite, prétendaient que l'Ukraine était tombée bien bas pour se choisir un animateur de télévision comme président. Ce qu'on a aussi oublié, c'est son premier contact avec les présidents américains. A l'époque, Trump terminait son précédent mandat. Et il avait tenté d'obtenir de Zelensky des informations sur l'affaire Hunter Biden, ce qui avait provoqué un scandale. Hunter Biden, c'est le fils de Joe Biden, un personnage impliqué dans de nombreuses affaires délictueuses, dont une histoire de corruption en Ukraine.
Certains se souviennent peut-être des Pandora Papers. C'est une enquête internationale de journalistes d'investigation qui, sur base de documents confidentiels, a révélé tous ces puissants qui transfèrent discrètement leur argent vers des paradis fiscaux afin d'échapper à l'impôt. Parmi eux, Volodymyr Zelensky. Avec son épouse, il avait mis au point des mécanismes de transfert des revenus de sa société de production audiovisuelle, notamment vers la place financière de Londres, afin d'échapper au fisc ukrainien.
Puis vint la guerre. Pour rappel, Zelensky s'était fait élire avec pour programme de ramener la paix dans le Donbass, où la guerre civile faisait rage depuis cinq ans. Avec la soudaine invasion russe de 2022, la situation change radicalement et le président ukrainien passe d'un quasi anonymat à la stature d'un héros international. C'est l'agressé qui refuse de céder à la force et qui poursuit vaillamment le combat. C'est celui qui reste à Kiev alors que l'armée russe approche des faubourgs.
Cette image masque d'autres réalités. Dès l'entrée en guerre, Zelensky et sa majorité politique décrètent la loi martiale en Ukraine, ce qui peut se comprendre. Mais, tirant parti de cette loi, ils suspendent la plupart des partis politiques d'opposition, la plupart des médias d'opposition, une partie des droits syndicaux et ils suspendent aussi les élections (qui auraient dû avoir lieu l'an dernier).
Il n'y a plus de presse libre en Ukraine. Celle d'opposition est interdite. Le reste est aux mains du pouvoir ou financé par des fonds américains (jusqu'ici, du moins) en sorte de diffuser le message qu'on attend d'elle. Quant aux journalistes, ils sont exempts de conscription pour exercer leur métier, une exemption qui peut prendre fin en sorte qu'ils veillent à ne pas froisser le pouvoir s'ils ne veulent pas recevoir un ordre de mobilisation pour le front.
Zelensky s'appuie sur un exécutif politique largement corrompu, comme c'est courant depuis longtemps en Ukraine (et pas seulement en Ukraine...). Il a d'ailleurs dû limoger à plusieurs reprises de ses ministres et fonctionnaires, sous la pression de l'administration Biden qui voyait qu'une partie de l'aide américaine pour la guerre était détournée en chemin par le pouvoir ukrainien.
En septembre 2022, pour ce que l'on en sait à ce stade, c'est Zelensky qui autorise les services secrets ukrainiens à faire sauter les deux gazoducs Nord Stream, en mer Baltique, c'est-à-dire à mener une attaque secrète dans les eaux européennes, contre une infrastructure appartenant pour moitié à l'Europe.
En novembre 2022, il s'oppose violemment aux Occidentaux au sujet de l'affaire du missile tombé en Pologne. Pour rappel, lors d'un bombardement russe sur l'Ukraine, un missile franchit la frontière, tombe sur un village polonais où il tue deux personnes. D'emblée Zelensky annonce qu'il s'agit d'un missile russe, que c'est donc une agression contre un pays membre de l'OTAN ce qui entraîne, via l'article 5 de l'OTAN, toute l'alliance atlantique à entrer en guerre aux côtés de l'Ukraine contre la Russie. Rapidement, les Polonais démentant l'affirmation de Zelensky en expliquant qu'il s'agit en fait d'un missile ukrainien de défense aérienne, tiré lors de l'attaque russe, et retombé en sol polonais. Zelensky maintient sa position. L'OTAN intervient, les Allemands aussi, pour contredire Zelensky. Il n'en démord pas, la tension grimpe. Il faut que ce soit Joe Biden lui-même qui confirme qu'il s'agit bien d'un missile ukrainien pour mettre fin aux échanges. Dans cette affaire, Zelensky était disposé à risquer une 3e guerre mondiale, c'est-à-dire l'apocalypse, pour se trouver des soutiens supplémentaires dans la guerre contre Moscou.
Plus généralement, il faut bien le dire, Zelensky n'a cessé de mentir au monde entier pendant les trois années de guerre, en présentant le conflit ukrainien selon une propagande bien huilée et omniprésente, en accusant les Russes de tout et n'importe quoi (apparition d'une armée nord-coréenne sur le front, bombardements sur les centrales nucléaires de Tchernobyl et Zaporija, etc.), propos relayés religieusement par les médias et politiciens occidentaux, le tout en vue d'alimenter une guerre sans fin contre la Russie.
Pourtant, la guerre sans fin n'est pas dans l'intérêt de l'Ukraine, de la population ukrainienne. Non seulement le pays n'est pas en mesure de gagner la guerre mais, chaque jour qui passe, ce sont des morts, des blessés, des destructions supplémentaires, du terrain grignoté par les Russes et un Etat ukrainien dans une situation financière de plus en plus critique. Par contre, la guerre sans fin est dans l'intérêt personnel de l'homme politique Zelensky. La guerre, c'est comme la bourse : tant que ça n'est pas fini, les pertes, aussi importantes soient-elles, ne sont pas actées. Le jour où l'on met fin à la guerre, le résultat s'impose à tous. Et le résultat, pour l'Ukraine, sera forcément mauvais. Or, pendant les années précédentes, il aura été demandé des sacrifices considérables à la population. Le réveil va être brutal. Et, à la première élection venue, Zelensky risque d'en payer le prix. Un peu à l'image d'un Netanyahou, s'il veut que sa carrière politique se poursuive, il faut que la guerre fasse de même.
Ceci exposé, je vois déjà venir les réactions : « Oui, mais Poutine... », « Oui, mais Trump... », « Oui, mais Machin... ». Je n'établis pas des classements. Je constate simplement une chose : Volodymyr Zelensky est tout ce que l'on veut, mais il n'est pas Churchill.