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Je rentrais hier soir du premier jour... - Thierry Seveyrat

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    Je rentrais hier soir du premier jour du procès #Mila, prévisiblement occupé par de nombreuses questions de procédures : décompter les présents, absents et en retard parmi les 13 prévenus (8 seulement présents) ; entendre un avocat proche de la France Insoumise, défenseur d'un homme de 30 ans venu avec sa maman pour avoir proposé à Mila "un bon coup de bite" pour la faire taire, s'écouter parler 25 minutes pour lire deux Questions Prioritaires de Constitutionnalité copiées-collées sur internet ; un autre avocat déplorer que sa cliente ait fait l'objet d'une garde à vue de 48 heures, le procureur lui précisant que les 13 prévenus furent tous délibérément perquisitionnés (à 6 heures du matin), mis en examen puis remis en liberté les mêmes jours aux mêmes heures, lors d'une même opération concertée du nouveau Pôle National de Lutte contre la Haine en Ligne ; d'autres encore solliciter et obtenir trois levées de contrôles judiciaires ; avoir lecture chaque fois à deux reprises des contenus des tweets concernés ; etc. Malgré tout, ce qui borne un état de droit, le caractère contradictoire d'un procès, ce qui permet d'accéder à la complexité et parfois à la vérité d'une affaire. Le reste de l'audience a été reporté aux 21 et 22 juin, au Tribunal de Paris toujours, pour l'audition des prévenus et de la plaignante, des avocats, et les délibérations.

    Je rentrais du procès Mila et j'ai choisi de terminer à pieds. Suivant le canal Saint Martin, marchant vers la Bastille, je n'ai pas douté longtemps lorsque mes pas longèrent la rue Pelée, pour prolonger jusqu'à la rue Nicolas Appert et les anciens locaux de Charlie où un écriteau précise encore, "Pour des raisons évidentes de sécurité nous vous demandons de maintenir cette porte fermée en permanence". Je pensais aux plus de 100.000 tweets reçus par Mila depuis 18 mois, à sa vie recluse, comme à celle de ses parents, à l'éducation nationale et à l'armée qui refusent d'assurer sa sécurité, à son sourire aussi derrière son masque. Je pensais à Cabu crayons à la main ou à Bernard Maris à l'ordre devant les deux frères, puis à Mila qui dans son corsage rouge écarlate, est restée une demi-heure debout, lorsqu'elle est rentrée dans le prétoire, pour s'affirmer vivante et fière face à ses harceleurs et menaceurs de mort, qu'ils soient purement pulsionnels ou plus opératifs. Je repensais à ce parcours de plus de 6 ans, depuis l'attaque de Charlie : aujourd'hui parmi ces 13 prévenus, dont 8 rêvent de mise à mort quand on critique l'islam, moins de la moitié seulement sont musulmans. Les autres se disent de gauche, se cherchent des causes, trompent leur ennui, et semblent prisonniers de leurs bulles numériques et pulsionnelles, comme abandonnés à eux-mêmes, dans un monde qui ne leur transmet plus rien.

    Si ce procès peut être utile il devra dire comment une idéologie exogène, littéraliste et mortifère peut enrégimenter à ce point une génération qui n'est plus traversée par rien, dont l'idée même que des valeurs plus grandes que son narcissisme numérique puissent lui être transmises est combattue comme "fasciste", et préfère anomie et pulsion, ou dont l'école dont ils sortent n'est plus capable de leur apprendre qu'on peut moquer ou mépriser une religion. Procès qui devra poser les normes requises de la sanction pénale pour sanctuariser la liberté de conscience et celle de vivre en paix et en sécurité, sans être noyé par des fatwas tweetées, haineuses et mortuaires, qui définissent la pulsion de mort comme ultime horizon politique. Cet horizon qui, des caricatures de Charlie à la gouaille de Mila, ou aux romans de Salman Rushdie, veut en finir de la vie, du rire, des femmes, de la création et de la liberté. Cette promesse d'agonie, face à tout ce qui élève. L'islamisme.


    Source : https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=772601756735614&id=100019573890828