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C'est à la lumière de ce qui se passe dans l'arrière salle qu'on peut aussi lire les mesures que Zemmour compte mettre en oeuvre s'il accède au pouvoir. Les milieux financiers et patronaux peuvent compter avec Zemmour sur un candidat tout aussi dévoué à leur cause que Macron et Pécresse.
Je ne mentionne pas seulement le fait qu'il est très proche de Bolloré, lequel se trouve en affaire avec Alexis Kohler, l'actuel secrétaire général de l'Elysée, comme nous en informe le dernier livre-enquête de M. Endeweld ("L'emprise"). Je me réfère ici surtout à la fin du discours qu'il a tenu lors de son meeting à Lille le 5 février, qui mérite toute notre attention.
Après avoir longuement déclaré qu'il voulait "réconcilier les classes" pour rassembler le travailleur et l'employeur, et valoriser le travail en récompensant le mérite et l'effort, Zemmour a écarté toute politique qui consiste "à gaspiller l'argent public".
Je cite: "L'argent public n'existe pas, cet argent, c'est celui que ceux qui le promettent vont vous voler". Ainsi, toutes les mesures de redistribution de l'argent public consistent selon lui à "déguiser un racket organisé en charité". En conséquence, conclut Zemmour, il faut cesser de financer la bureaucratie, l'assistanat, l'immigration et l'endettement de l'Etat.
"La France est déjà le pays le plus taxé du monde". Zemmour préconise des solutions à mettre en oeuvre très vite pour mettre fin à ce gaspillage. Parmi celles- ci: arrêter le financement du "grand remplacement" en cessant d'accorder des aides sociales et des logements sociaux aux "étrangers non-européens" (il développe longuement ces points); ou encore mettre fin aussi à la redevance qui finance l'audiovisuel public, notamment France inter dont, je cite, la propagande est "immigrationniste, wokiste et décoloniale".
"L'Etat doit être au service des Français", insiste Zemmour
Inutile de préciser que Zemmour ne compte pas dans le gaspillage de l'argent public les aides multiples aux entreprises, notamment à celles du CAC 40, qui s'élèvent annuellement à un total de 140 milliards, et qu'il ne mentionne pas non plus l'évasion fiscale (80 milliards).
Pour améliorer le pouvoir d'achat, Zemmour veut mettre en oeuvre une mesure qu'il n'hésite pas à qualifier de "révolutionnaire". Il déplore que le salaire net soit trop bas pour les salariés, et que le salaire brut soit trop élevé pour les employeurs. Aussi, pour "valoriser" le travail et le mérite, il compte supprimer les "charges sociales" car selon son diagnostic, ce sont elles qui "empêchent" de le valoriser (en oubliant de mentionner que les cotisations sociales financent la retraite et la protection sociale). Au lieu d'augmenter les salaires (et avec eux "les taxes"), Zemmour veut instaurer un système de "primes 0 charge": cela permettra selon lui d'augmenter les revenus des salariés sans appauvrir l'entreprise. Zemmour déclare s'inscrire dans la politique de la "participation" voulue par le Général de Gaulle, selon laquelle les travailleurs doivent être associés au bénéfice de leur entreprise. Une prime leur sera versée en fin d'année en fonction des résultats, et cette prime pourra monter jusqu'à 3 mois de salaire, sans charge pour l'employeur et sans impôt pour le salarié. Zemmour insiste: ce sera le moyen de "récompenser celui qui travaille" : celui qui travaillera plus sera mieux rémunéré et cela permettra aussi "de lutter contre les arrêts maladie" et l'absentéisme de complaisance" (sic!).
Les propos racistes de Zemmour sont odieux et scandaleux mais on aurait tort de ne voir qu'eux. Ses propos sont des appels à la violence contre les immigrés, les Musulmans et les étrangers, mais ils sont aussi une menace pour l'ensemble des salariés (qu'il cherche à diviser), quelle que soit leur origine.
Avec Zemmour, plus d'augmentation de salaires mais des primes, qui permettent aux patrons de ne plus avoir à financer les retraites et la protection sociale, et sont destinées à produire l'illusion que les salariés bénéficient d'une augmentation de revenus. Avec Zemmour, c'est encore une diminution drastique des impôts qui permettent le financement des services publics. Cela tombe bien: l'Union européenne exige le "remboursement de la dette" et "la baisse de la dépense publique".
En définitive, les mesures promises par Zemmour sont-elles très éloignées de celles de Macron ou de Pécresse? J'invite chacun à lire l'allocution télévisée de Macron du 12 juillet 2021, dans laquelle il annonçait la mise en place du pass sanitaire. Vous verrez que là aussi, il était question de récompenser le travail, d'en finir avec les règles et les statuts qui lui font obstacle , d'en finir avec l'assistanat, de récompenser enfin le mérite et l'effort.