« Maintenant, je sais »
Il y a quelques jours, un jeune homme, étudiant en École de Commerce, me posa cette question : « À quoi cela vous sert-il aujourd’hui de savoir le latin et le grec ancien ? ». Il ajouta : « il y a des traductions, il n’y a plus aucun besoin de connaître ces langues mortes ». je lui répondis alors : « Et à quoi sert-il aujourd’hui de savoir compter, puisque les smartphones ont une calculatrice à l’intérieur, que les ordinateurs calculent plus vite et mieux que nous, il n’y a plus besoin non plus d’apprendre à compter… », et il me répondit : « Absolument c’est tout à fait inutile ».
Il s’en est suivi une longue discussion pour savoir qui de l’humain ou de la machine est le maître. Si l’humain ne sait plus rien et que seule la machine sait, alors l’humain est son esclave, la machine décide de tout, ou plus exactement la petite élite qui programme la machine décide de tout.
Je pense que la réflexion de ce jeune homme n’est pas du tout isolée. Elle correspond à la pente du moindre effort que l’ensemble du système propose en permanence à la jeunesse. Regardez les émissions de télévision destinées aux jeunes, écoutez les émissions de radio destinées aux jeunes, regardez tout ce qui sur l’Internet est destiné aux jeunes : on leur explique qu’il n’y a pas de raison de s’en faire, qu’il faut profiter de la vie et que l’on n’est pas là pour faire des efforts, s’ennuyer ou se fatiguer. Qu’apprendre, finalement, ne sert pas à grand-chose, qu’il faut surtout profiter de la vie et trouver les bonnes coinches pour devenir milliardaire, comme le leur conseille l’actuel locataire de l’Élysée.
Que la seule chose dont il faut avoir peur c’est le réchauffement climatique, et au nom de cette religion réchauffiste, accepter tout et n’importe quoi. Comme au nom de la lutte contre les pandémies, qui sont maintenant promises à un développement régulier, et systématiquement adossé à des grands groupes pharmaceutiques dont on découvrira probablement assez vite qu’ils prendront l’habitude de fabriquer le vaccin avant de fabriquer le virus…
On ne mesure pas encore à quel point notre société se transforme ainsi rapidement. À quel point notre civilisation se décompose.
En une ou deux générations la société sera numériquement dominée par des personnes qui n’auront plus aucune clé pour se révolter. Elles s’en seront remises aux machines dont elles penseront être propriétaires pour organiser leur vie – qui leur sera présentée et vendue comme une vie de plaisirs – et lorsqu’elles se rendront compte que « le pain et les jeux » qu’on leur fournit est un programme insuffisant, elles n’auront plus les ressources suffisantes pour vouloir autre chose, et encore moins pour le conquérir.
Il n’y a que dans quelques écoles d’élite, comme l’École alsacienne – où sont scolarisés les enfants du ministre de l’éducation par exemple – que l’on apprend non seulement la nécessité mais aussi le goût de l’effort. Que l’on apprend que tout ce que l’on ne sait pas soi-même, c’est un morceau de liberté que l’on perd.
On apprend cela aussi dans les pensions de Suisse où vont les enfants de milliardaires.
Qu’avoir des collaborateurs ou des machines qui savent à votre place, c’est avoir des collaborateurs ou des machines qui décident à votre place, et que l’on ne peut donc se permettre de renoncer à connaître des pans entiers de la connaissance humaine. Même si personne ne peut penser détenir l’intégralité de la connaissance à lui tout seul aujourd’hui, cette ambition des encyclopédistes d’être « un honnête homme » n’est plus à notre portée… c’est que l’on en sait beaucoup plus qu’à l’époque.
La préparation de la « société liquide », ou l’organisation du « Great Reset », c’est en œuvre sous nos yeux. C’est d’ailleurs écrit en toutes lettres dans les programmes de divers organismes et institutions, et les discours que de vieux contestataires peuvent opposer ne servent pas à grand-chose, dans la mesure où la génération qui vient, n’a ni moyens, ni raison de les entendre.
C’est d’une part, qu’elle est largement composée de personnes issues de l’immigration c’est-à-dire que cela ne favorise pas l’existence de traditions ou la reproduction de représentations inconsciemment issues des luttes du passé, et d’autre part qu’elle est projetée dans une inconscience dans le domaine politique et social qui est compensée par une angoisse vitale dans le domaine climatique et viral.
Lorsque les baby-boomers, devenu Papy-boomers – qu’on leur apprend chaque jour à haïr – auront quitté cette vallée de larmes, ils seront enfin libres.
Libres d’obéir sans même s’en rendre compte, car ils ne sauront plus guère faire autre chose…
Et ils penseront, après avoir regardé un journal de propagande : « Je suis content les médias pensent comme moi »…
Comme nous sommes dimanche, je diffuse – lorsque je ne suis pas interdit de parole ici – une chanson sur cette page et comme nous parlons du savoir, qui est un autre nom du pouvoir, cela m’a fait penser à une chanson de 1974 qui évoque cette question du savoir, mais sous un tout autre angle qui est celui de l’expérience de la vie que l’on peut se constituer au fil du temps, sentiment trompeur que lorsque l’on ne sait pas grand-chose, on a – tout naturellement – de savoir tout. Sur les paroles de Jean-Loup Dabadie et une musique de Philippe Green, c’est Jean Gabin qui interprète ce titre « Maintenant, je sais »
Gilles CASANOVA
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